Vercingetorix

Genre : les vers sages ont un risque

Fiche technique

Voir notre autre critique de Vercingétorix pour la fiche.

Revue : Philippe Heurtel

Nous sommes en 2001 après Jésus Christ. Toute l’industrie du cinéma est occupée par des réalisateurs de talents, soucieux de leur mise en scène, de la cohérence de leurs scénarios et du talent des acteurs. Toute ? Non ! Un groupe d’irréductibles tacherons résiste encore et toujours à la qualité. Leur secret réside dans une potion magique, Christophe Lambert, qui leur donne une nanarité surhumaine. Et la vie n’est pas facile pour les camps retranchés de Nanarorum et de Cinébix.

Le générique nous montre une comète qui traverse l’espace et croise le soleil ainsi que quelques planètes. Le titre – VERCINGETORIX – vole en éclat ; on se croirait dans un film de SF, mais non, ça n’a rien à voir.

Le film débute avec l’enfance de Vercingétorix. Son père est trahi par son frère, et déjà les dialogues commencent très fort : « Ce n’est pas la loi que tu sers, mais les fausses couleurs de ta pestilentielle ambition. ». Et comme « La magie de sa mort doit nous apprendre la leçon de son sacrifice. », Vercingétorix jure de se venger.

Les gamins qui jouent Vercingétorix jeune et sa copine Epona sont particulièrement mauvais, mais Christophe Lambert n’étant pas encore apparu, le spectateur ne sait pas encore qu’il vient de manger son pain blanc.

Quelques années plus tard, le jeune adulte Vercingétorix – Totophe Lambert – veut repartir à Gergovie pour venger son père, mais Yoda, pardon : le druide qui lui sert de mentor, lui dit qu’il n’est pas prêt. Au passage, on apprend qu’il existe en Gaule des druides, des maîtres druides et un « archi druide », mais je ne suis vraiment pas certain qu’il faille retenir ce « fait historique »... Au cours de la leçon de combat qui s’ensuit, le jeune gaulois apprend que « Si tu sais ce que tu veux, ton adversaire le voudra aussi. ». Avec des conseils pareils, on ne peut que réussir dans la vie, aussi Vercingétorix part-il venger son père. Il devient ainsi le chef de sa tribu.

Bref, les moustaches de Lmabert poussent, et il s’en sert pour chatouiller les lèvres de sa copine Epona qu’il vient de retrouver et qui est devenue une femme. Puis il se range aux côtés de César qui veut conquérir la Bretagne. J’en profite pour signaler au passage que César et Vercingétorix, les personnages principaux du film, sont tous deux dénués de la moindre stature, et balbutient tout du long des dialogues pathétiques dans lesquels le mot « destin » apparaît dans une phrase sur deux.

Mais quand Vercingétorix comprend que c’est César qui fut jadis responsable, par ses intrigues, de la mort de son père, il est pas content (« Le jeu est terminé. ». Ça veut pas dire grand chose, mais ça mange pas de pain) et il se révolte contre les légions romaines.

César faisant route vers Bourges, Lambert décide de ne pas défendre la ville car, explique-t-il à ses compagnons : « A cause de votre stupidité, César arracherait la victoire des mâchoires de la défaite dans lesquelles je le tiens. » César massacre Bourges, et trouve le secret des épées gauloises (qui se transmet de bouche de forgeron à oreille de forgeron ?). Dans la suite, on n’entendra plus du tout parler de ce secret. Sans doute parce que c’est un secret.

Puis vient la victoire de Gergovie. Vercingétorix déstabilise les troupes de César en leur jetant des poulets (je ne peux m’empêcher de songer aux animaux que les français jettent sur les anglais dans le "Sacré Graal" des Monthy Pythons), puis exhibe devant les légionnaires des bougresses dépoitraillées. S’ensuit une scène de bataille faite de plans saccadés où l’ on ne voit pas grand chose.

Malgré la victoire, Lambert est taciturne : « Je ne veux pas d’une bataille, même si nous la gagnons. Et si nous la gagnions, Rome n’aura pas de repos jusqu’à ce qu’elle l’ait transformée en défaite. » Mais il se reprend et galvanise ses troupes : « Je vous mènerai à la victoire dans l’antre de la mort, au son du chant de guerre qui fait battre mon cœur. » (tiens, un alexandrin). Vous remarquez, j’ai beaucoup utilisé la touche « Pause » de ma télécommande au cours de ce visionnage, d’où l’avantage de voir ce film en vidéo plutôt qu’au cinéma (outre celui de ne pas payer 50 balles pour une telle merde).

Petit interlude dans le camp des germains, alliés de César : les lugubres hurlements des loups envahissent la nuit, sans doute pour bien montrer qu’on est chez les barbares. Vous savez, comme dans les albums d’Astérix où, à la frontière Empire Romain – Barbares, les routes sont pavés et lustrées côté empire, et dégueulasses côté barbares.

Donc, César assiège Alésia. « Les dés sont jetés », dit... Vercingétorix. Ha bon, je croyais que c’était de César. Qui a copié sur l’autre ? Ou alors tous deux ont lu les mêmes pages roses du dictionnaire. Pour montrer l’ immensité de l’armée de César, le réalisateur enchaîne des plans très courts où l’on voit une poignée de soldats. Le résultat est conforme à la réalité : complètement fauché.

De son côté, Vercingétorix demande à ses compagnons de ramener des renforts : « Chevauchez aux quatre vents. Rassemblez une immense armée et venez à notre secours. C’est votre défi, relevez-le. Vous serez le marteau et je serai l’enclume. » J’ai réécouté ce passage plusieurs fois pour être certain de ne pas avoir rêvé.

Puis personne n’ose attaquer l’autre, la tactique de Lambert étant d’ attendre (oui, mais pourquoi ?). Assiégés et assiégeants s’emmerdent, sans parler du spectateur qui a l’impression d’être assiégé par sa télévision et est prêt à la réédition sans condition. Mais un chef gaulois trop impatient lance l’attaque. Vercingétorix se résout au combat et annonce à ses troupes: « Ensemble, nous deviendrons immortels. » Hey, Christophe, tu t’es pas trompé de film ?

Nouvelle scène de bataille très confuse, dans laquelle les gaulois se font battre à plate couture pendant que Lambert erre au milieu, sans doute à la recherche du script. Vaincu, il fait ses adieux à Epona :
« Il importe peu à la fin de gagner ce que ton ennemi va perdre, ou de perdre ce qu’il va gagner.
– Où tout cela va-t-il te mener ?
– Aussi loin que mon énergie me le permettra. Pour que la grande roue du destin continue sa course, éternellement poussée par l’amour, aussi loin que la nécessité l'exige. »

Je vous promets que je n’invente pas le moindre mot.

Puis Vercingétorix dépose ses armes aux pieds de César : « Je suis venu t’ offrir l’éclat de ta victoire. » A quoi César répond : « L’éclat de ma victoire fait peser plus encore les invisibles défaites de mon passé. » Si vous avez compris ce que ça veut dire, écrivez-moi, les cinq premières bonnes réponses gagneront une amphore dédicacée par Assurancetourix.

Voilà, c’est la fin du film. Une voix off évoque l’assassinat de César par Brutus, et la mort de Vercingétorix, « deux ans tôt, vers deux heures de l’ après-midi. » Insérez le nombre de points d’exclamation que vous jugerez nécessaires. Puis c’est le générique de fin, le même que celui du début (comète, planètes, soleil, espace) mais à l’envers.

Une fois le choc passé, l’on se prend à rêver. A rêver d’une série de films tous aussi mauvais dans lesquels notre inénarrable Christophe Lambert interpréterait d’autres grands chefs français : Clovis, Charlemagne, Louis XIV, Napoléon, De Gaulle, Mitterrand, Chirac... Ha oui, ça serait bien...

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