Crocodile

Genre : safari annuel du Torchenave Club

Fiche technique

Revue : Docteur Bis

Hé oui, mes amis, rassemblez-vous autour du feu, c'est reparti pour un nouvel épisode. De l'action ! Du suspense ! Voilà...

LES AVENTURES DU DOCTEUR BIS DANS LA JUNGLE DU VIDEOCLUB DE LA MORT QUI TUE (Quatrième épisode)

...Et quoi de plus réjouissant qu'un bon gros film à grosses bébêtes, surtout lorsqu'il porte un titre aussi éloquent que :

CROCODILE

Parfois, et je tiens à le dire, lorsqu'on se trouve devant un magnétoscope, on ne se rend pas assez compte du miracle auquel on est sur le point d'assister. Je veux dire, nos ancêtres se sont hissés à coups de massue jusqu'au sommet de la chaîne alimentaire en faisant " Onkr ! " et " Groumph ", avant de découvrir, à grand renfort de grattement de tête, le langage articulé, la roue et d'autres trucs, puis ils maîtrisèrent les sciences et les technologies, étendirent leur savoir sur le globe, cognèrent sur quelques crânes, brûlèrent quelques hérétiques, puis découvrirent les joies de la technologie, sortirent de l'obscurantisme, usinèrent des produits manufacturés et des congés payés, bref, quelques milliers d'années de génie humain se sont conjuguées pour que l'on puisse glisser une cassette dans le réceptacle ad hoc et voir s'illuminer l'écran de tous nos rêves et nos cauchemars. Magique ! Puis on tombe sur un film comme celui-là, et on se dit que, sommes toutes, nos chers et révérés ancêtres auraient peut-être mieux fait de rester couchés. C'est chez Imatim, fort pourvoyeur d'un peu n'importe quoi, et est réalisé par Tobe Hooper. Attention : depuis peu, ce monsieur est en train d'oublier qu'il a un jour traumatisé le monde avec " Massacre à la Tronçonneuse " et, après d'honorables séries B comme " Massacre dans le train fantôme " et un saut chez tonton Spielberg, s'enlise peu à peu dans la voie du film branquignol mais sympa (" The Mangler "), fauché et crétin (" Spontaneous Combustion "), voire franchement gogol, comme ce " Night Terror ", ou Robert " Freddy c'est mouah " Englund cachetonnait dans le rôle d'un Marquis de Sade qui ressemblait à peu près autant au vrai Marquis qu'un trombone à coulisse ressemble à Maggie Cheung et pervertissait par-delà le temps une cagole si bécasse qu'on se demandait pourquoi il pouvait bien s'y intéresser. Donc, c'est comme les productions ‹ mais productions seulement ‹ Wes Craven : méfiance et masque de plongée.

On ouvre sur une vague exposition d'une bande de torchenaves fort semblable à toute les autres bandes de crétins peuplant ce genre de film, ne pensant qu'à hurler des insanités et boire de la bière, lesquels crétins se font rabrouer par un shérif acariâtre (Conformément au Code Immuable de la Série B) Parallèlement, des rednecks locaux racontent ‹ en insistant bien pour qu'on aie compris ‹ que la tannerie locale vient de fermer (Quel rapport avec la choucroute, me direz-vous ? Boh, on en est qu'au début...). Ils en profitent pour bousiller des oeufs qui traînaient là (Sont-ils taquins !) et, bien sûr, se font bouffer par la maman, un crocodile géant (Vu le titre, vous n'attendiez tout de même pas un hamster sous stéroïdes ?) qui a la présence d'esprit de pousser la voiture à l'eau, ce qui prouve qu'elle a dû voir " Psychose " lors des soirées-projos du Saurien's Club. Au même moment, autour du feu, un des torchenaves imbibé raconte qu'un nommé Harlan a ramené un crocodile d'Egypte afin de profiter des pouvoirs d'un Dieu Egyptien quelconque et que l'hôtel où il résidait est considéré comme maudit, hanté, vilain, pas beau, etc. Bien. A partir de là, le crocodile entreprend une partie de cache-cache interminable avec les jeunes torchenaves qui continuent d'énoncer des âneries ; suspense qui tourne court, vu que 1) pas un seul n'a le moindre intérêt, on aurait plutôt hâte que le crocodile ou quelqu'un d'autre le boulotte, même des moustiques, et 2) On sait que, conformément à l'article 8 du CISB, il est impensable que l'un d'entre eux se fasse bouffer à ce stade ; même le chien de service, dont c'est pourtant la traditionnelle fonction scénaristique, y échappe. A noter que ce croco a su rester ignoré de tous depuis plus d'une cinquantaine d'années avant qu'on ne décide de l'envoyer casser du bouseux et du jeune crétin. Les torchenaves roucoulent donc, avec des discours romantico-cuculs pour faire zouli et allonger le métrage. Ils rient (fort). Disent des bêtises (beaucoup). Boivent de la bière (beaucoup). Pouf, pouf. Bref, lorsque le premier torchenave se fait boulotter à l'insu des autres en vomissant sa bière dans le lac (Encore un coup de morale ?)

On comprend vite que ledit lac ressemble fort à Crystal Lake et que le croco n'est qu'un avatar de Jason animé par la magie (?) des effets informatiques et du caoutchouc. Et comme le bateau est parti à la dérive, notre sac à main a les coudées franches, loin du shérif qui passe son temps à survoler le lac en hélicoptère et finit par retrouver la voiture immergée, puis les oeufs cassés, puis une main coupée, ce qui ne l'avance guère (Vous feriez quoi à sa place ?). Le croco peut donc s'enrouler une serviette autour du cou et sortir l'argenterie... Par contre, il casse un peu vite son coup en apparaissant à l'allumeuse écervelée (Pardon : bimbo, comme on dit pour faire branchouille) sans même la dévorer. Il attaque donc le bateau, ce qu'il aurait pu faire avant d'ailleurs, mais c'est normal, puisqu'on l'a repéré, selon l'article 7 du CISB.

On remarque au passage que le budget " effets spéciaux " devait être assez réduit : on est plus proche de " Killer Crocodile " que de " Lake Placid "... Entre-temps, le shérif se rend à l'hôtel dont parlaient les torchenaves ou, apparemment, un échappé de " Massacre à la Tronçonneuse " élevait des alligators, dont celui qui s'est échappé. Pourquoi ? Ben, parce qu'il faut bien une explication... Pour celles-ci, d'ailleurs, faut s'accrocher ! Le croco ayant tué son père et son grand-père, le proprio légitime de ce bestiau Egyptien l'a gardé au lieu de le tuer ; ce doit être logique quelque part... C'est donc un papy croco, puisqu'on nous informe qu'il a 96 ans et va " dévorer tout ce qu'il trouvera sur son passage " (On s'en serait doutés...) " Quel rapport avec la fermeture de la tannerie ? " demande celui qui a suivi. Mystère... Au passage, on voit enfin un plan avec un vrai alligator. Le seul à peu près convaincant. Et d'ailleurs, le seul bon acteur du film... Le proprio change alors de rôle pour prendre celui du Vieux chasseur, qui balance des vérités peu convaincantes sur le bestiau à pourchasser, selon l'art. 34 alinéa 3 du CISB. Résultat le shérif, qui a dû se repasser " les dents de la Mer " en boucle, part chercher le croco sur un bateau minuscule dont le bestiau ne ferait sans doute qu'une bouchée au lieu d'alerter des renforts et des spécialistes, bref, de faire un copier-coller avec " Lake Placid ". La greffe étant rejetée, il continue (Le con !) histoire d'échanger des souvenirs de guerre avec le Vieux Chasseur en buvant du bourbon. On voit donc qu'apparemment, le VC n'est pas propriétaire de papy croco, qui était bel et bien en liberté (Et, accessoirement, serait " Le fils du Diable ". Pas très ressemblant, le fiston. Je serais M'sieur Satan, j'aurais une petite discussion avec M'dame Satan.) Cela nous ramène à la question d'avant : pourquoi n'est-il pas apparu plus tôt ? M'enfin, bon... Bon, papy croco détruit le bateau, donc nos torchenaves n'ont plus qu'à rester à l'intérieur des terres pour éviter à cette menace... Hé bien non, papy croco, fort perspicace, réussit à les retrouver ; comme on le voit de pied en sac, heu, cap, on constate que le budget CGI n'était pas plus élevé que celui des effets spéciaux. Ou du film. Enfin, même " Komodo ", pourtant farouchement nul, avait au moins cet avantage... Bon, le croco évoque de plus en plus Jason avec des grognements menaçants à la place du traditionnel " Tchi tchi tchi ha ha ha ", les ados se trouvent une baraque que le sac à main pourra démolir en deux coups de cuiller à pot, et comme on en est à une heure treize du bouzin, on regarde subrepticement sa montre en attendant un finale qui rachèterait le tout. Papy croco va-t-il boulotter la bougresse qui s'est isolée aux toilettes pour se passer de l'eau sur le visage (Selon l'article 12 alinéa ter du CISB, les protagonistes s'y rendent toujours pour toute les raisons possibles et imaginables, sauf celle qui y attire tout être humain normalement constitué avec une régularité variable selon les individus.) Bon, en attendant, à une heure 19, on a droit à l'explosion obligatoire selon l'art. 6 alinéa bis du CISB (L'alinéa ter précisant qu'elle doit obligatoirement figurer dans la bande annonce) et, comme le précise le shérif toujours sur son canot, " C'est de pire en pire ". Je ne vous l'envoie pas dire. Au passage, on nous explique que papy, ou plutôt mamie croco agissait pour se venger envers ceux qui ont touché à ses oeufs et non pour se nourrir ; sauf qu'à ce stade, on s'en fout (Accessoirement, c'est le même VC qui précisait avant que mamie croco " dévorerait tout sur son passage ", mais bon. Entre-temps, mamie croco a dû devenir végétarienne... " Et quel rapport avec la fermeture de la tannerie ? " glapit celui qui a suivi avant de se faire éjecter à grands coups de pied dans le matricule.).

Intervient alors enfin, pour nous réveiller, LA scène Nanardesquement correcte du film, celle qu'on se repasse pour être sûr qu'on a bien vu : celle ou mamie croco effectue un bond digne du Marsupilami ‹ houba houba hop ! ‹ pour sauter PAR-DESSUS le canot et retomber cinq mètres plus loin ! On l'imagine s'entraînant depuis des années en regardant assidûment les Véronique et Davina du coin pour réussir un coup pareil...Bon, quelques mauvais CGI plus tard, le Vieux Chasseur est bouffé, le shérif est bouffé, nos torchenaves décident de rendre coup pour coup, et votre docteur préféré se mets des bouts d'allumette sous les paupières pour ne pas s'endormir. On remarque au passage que le pire de tous les torchenaves du groupe est si indigeste qu'après l'avoir gobé, mamie croco le revomit illico. Le finale, enfin, à défaut d'être spectaculaire, déclenchera quelques ouarf... Mais se finit en queue de poisson : l'oeuf servant d'appât éclot, (Pourtant, ils semblaient bien frais dans les scènes précédentes, mais bon...) mamie repart avec son petit et... C'est tout ! Mais un " Crocodile 2 " est déjà en chantier... (Soupir...)

On comprendra aisément que ce machin bat tous les records en termes d'illogismes et ne cesse de se prendre les pieds dans des explications dont on se passerait bien. Comme le reste, d'ailleurs. Quelques morts. Peu de sang. Pas d'érotisme. Une mamie croco. Un chien dénommé " princesse ". Une tannerie fermée gratuite. Un hôtel maudit gratuit. Un poil de kung fu, du redneck fu, du torchenave fu, du oeuf-de-croco fu, du canot fu, du marsupilami fu, du CGI fu. Prescription du docteur : Eviter cet équivalent cinématographique de la vache folle. Effet secondaires : une passion subite pour les sacs à main. N'oubliez pas, sans une vigilance éternelle, cela peut arriver chez vous.

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