Horrors of spider island

Genre :  huile d'arachnide

Fiche technique

Revue : Michel Pagel

Avant que Fassbinder et autres n'en fassent un des plus pénibles du monde, le cinéma allemand nous a apporté quelques petits bijoux tels que celui-ci.

Un directeur de casting américain, flanqué de son assistante Georgia et de sept charmantes danseuses exotiques, part pour monter une revue dansante sexy. Leur avion prend feu et tombe dans la mer. On voit de très jolis stock-shots d'un appareil en flammes qui tombe carrément à la verticale, puis on entend plouf, et on se dit qu'il est impossible que qui que ce soit ait survécu. Or, si, dites donc, par miracle, absolument tout le monde a survécu (sauf le pilote, parce qu'on n'avait pas les moyens d'engager un acteur de plus) et se retrouve sur un canot pneumatique. Alors que l'eau douce se raréfie, chouette : terre ! Une île. Sur laquelle il y a de l'eau douce à foison, et même une cabane de rondins prouvant la présence d'habitants. Et dans la cabane... son propriétaire, raide-mort, emberlificoté dans une toile d'araignée géante au milieu de son salon. Iiiiih ! crient les filles, avant de retourner soulever leurs jupes au fond de l'écran pour faire joli.

On retrouve le journal du mort, lequel se révèle être un professeur venu ici pour extraire du minerai d'uranium (car, comme nous le dit notre héros apparent, Gary, le directeur de casting : "Oh, un marteau à long manche ! Ça doit servir à extraire un métal quelconque de la mine. Très probablement de l'uranium." Parce qu'il s'y connaît, Gary, mine de rien. Là-dessus, tout ce joli petit monde s'installe pour la nuit, ce qui donne l'occasion aux danseuses de montrer leurs jambes et leurs sous-vêtements. L'une d'entre elle commence à draguer Gary un peu trop ouvertement au goût de Gloria, qui est sa copine en plus d'être son assistante. Pour se calmer, le directeur de casting va faire un tour dans la nature (ce qui serait aussi votre premier réflexe si vous saviez qu'une araignée géante qui s'en prend à l'homme rôde dans les parages). Les filles, pendant ce temps-là, s'entendent pour la nuit SUR LA VERANDA, donc dehors ! Bon, elles ne doivent pas avoir peur des araignées, mais enfin quand même.

Et ce qui doit arriver arrive : l'araignée (très jolie, probablement à base de carton pâte ; pas crédible un instant, mais ça ferait un jouet pour enfants sympa) attaque Gary et le mord à la gorge. Et ce qui doit arriver arrive encore : Gary se transforme en un monstre arachnide ! Enfin... disons qu'il met un masque poilu et des gants tout aussi poilus mais également griffus, et puis on dit que c'est un monstre arachnide, OK ? Merci, c'est sympa.

Le lendemain, il tue une des danseuses qui a commis l'erreur de s'isoler. Bon, à partir de là, l'araignée, on ne la voit plus. Je ne sais pas, elle disparaît, elle hiberne, ou elle se casse furieuse, parce que la production refuse de payer son cachet. En tout cas, exit la bête. Bon. Nous reste le monstre hybride, vous allez me dire. Ouais, mais on va pas le revoir avant une bonne demi-heure, lui non plus. On a bien mieux à faire.

Par exemple suivre nos jolies danseuses pendant qu'elles se baignent à poil (non, on ne voit rien, c'est filmé de loin, je rappelle qu'on est en 59) et le débarquement de deux types qui sont là pour livrer quelque chose au professeur. Au soulagement général, ils annoncent qu'un bateau sera là dans quelques jours et pourra donc ramener les beautés dans leurs foyers. Pour fêter ça, elles se mettent toutes en bikini orné de jolies fleurettes et elles dansent autour d'un feu de camp, au rythme de la musique qui s'échappe de... qui s'échappe de... bon, c'est fini de poser des questions idiotes ? Y a de la musique, voilà tout. Il faut bien qu'il y ait de la musique pour qu'elles dansent, non ?

Là, le scénario s'apesantit sur les personnages et les relations follement complexes qui se créent entre eux. Pendant presque un quart d'heure, on a droit à un coup de foudre, à des scènes de jalousie, etc... et c'est presque aussi passionnant qu'un épisode d'Hélène & les Garçons. A ce stade, le spectateur, pour peu qu'il ait réussi à ne pas s'endormir, ne se rappelle même plus qu'il y a un monstre et une araignée géante sur cette île. D'ailleurs, personne n'en parle jamais. Après une interminable période de déhanchements pas désagréables à regarder mais pas fascinants non plus et de blabla cliché, un des gars et une des danseuses se donnent rendez-vous sur la plage. Quand la fille arrive, son mec est déjà mort. Vu qu'il a été mordu à la gorge, on suppose que c'est l'araignée la responsable, mais on ne la voit pas. Par contre, on assiste au grand retour du monstre hybride, qui poursuit la jeune femme jusqu'en haut d'une falaise, avant de la jeter dans le vide (à moins qu'elle ne tombe toute seule, le montage est assez imprécis pour qu'on ait un doute).

LA VICTIME : Aaaaaaah !
GEORGIA : (surgissant de la cabane en compagnie des autres) On aurait dit... un cri !
LA VICTIME : Aaaaaaaah !
GEORGIA : On dirait la voix de Gladys !
LE PUBLIC : Mais qui tu veux que ce soit, connasse ? Toutes les autres sont là !

N'écoutant que leur courage, les survivants allument des torches éclairantes et poursuivent l'infortuné Gary transformé en spiderman du pauvre jusqu'à la zone où "les sables mouvants commencent". On ne savait pas qu'il y avait des sables mouvants, jusqu'ici, mais bon, on va pas chipoter. J'ai besoin de vous le dire que le monstre s'enlise et que tout le monde, ensuite, s'en sort sain et sauf ? Et le bateau quitte l'île avec son délicieux chargement sans qu'on ait revu cette putain d'araignée.

Aaaaah ! Ça fait du bien de temps en temps d'en voir un vrai. Du qui sent le nanar, qui a goût de nanar, qui sonne comme du nanar, et ça tombe bien, c'est du nanar. Cheap, stupide, mal fait, incohérent, surtout destiné à exposer la plastique des interprètes dans les limites de la censure de l'époque, Horrors of Spider Island est un must ! La performance convaincante de l'actrice qui joue Georgia (pourtant pas servie par ses dialogues — voir plus haut) menace parfois de le faire loucher du côté de la série B, mais ça ne dure jamais plus de quelques secondes, heureusement.

Chaudement recommandé...

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